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PHOTOS DU COMITÉ FNACA DE 1976 À NOS JOURS

DE GAULLE TRAÎTRE ?

DE GAULLE TRAÎTRE ?


DE GAULLE TRAITRE ? BOURREAU ? ASSASSIN ?
A l'occasion de l'inauguration de la statue du général de GAULLE, le 18 juin 2011, une importante campagne d'opinions hostiles (relayée par NICE-MA TIN comme par France 3 Nice sans aucune version contraire) a précédé et suivi cet événement, certains des termes employés m'ayant révolté, voire indigné en tant que citoyen, historien et fils de résistant du MNRPGD.
Nous avions déjà eu, au mois d'avril, un avant-goût avec la campagne médiatique des nostalgiques de l'Algérie française et de l'OAS visant à réhabiliter, à l'occasion du 50e anniversaire du «putsch d'Alger», le «quarteron de généraux factieux» et les officiers les ayant suivis dans un combat d'arrière-garde mené1 contre la République et le processus de paix approuvé par une très 1 grande majorité des Français. A : cette époque-là, je n'étais pas majeur et je ne nourrissais pas de sympathie particulière pour le gaullisme mais j'approuvais la politique d'autodétermination et la parole donnée au peuple français qui entérina à deux reprises, en 1961 et en 1962, le processus pacificateur. Que des Pieds Noirs en veuillent encore au général de GAULLE de les « avoir trompés » en 1958 avec la célèbre phrase « Je vous ai compris » ne me choque pas mais ce qui me scandalise, ce sont les arguments utilisés pour refuser une inauguration de statue, représentant «l'homme du 18 juin » en train de descendre les Champs-Élysées le 26 août 1944, sur la place qui porte son nom depuis 1973, précédemment place GAMBETTA (l'animateur de la résistance contre les Prussiens en 1870) puis de la Libération (en raison des combats s'étant déroulés dans le secteur le 28 août 1944): «on ne saurait honorer un général qui a été un traître », «il a été notre bourreau », « il est le responsable de l'assassinat de milliers d'entre nous» « c'est la statue de la honte», «non à la statue d'un bonimenteur ».
Primo, il est vrai que de Gaulle fut condamné à deux reprises pour « désertion» et « dissidence» par le tribunal militaire de Toulouse, le 4 juillet 1940, à quatre ans de prison puis à mort, le 2 août suivant, par le tribunal militaire de Clermont-Ferrand, mais, 71 ans après les faits, comment peut-on justifier cette attitude néo-pétainiste qui conduirait à approuver, en condamnant la voie suivie par le général rebelle, la suppression de la République, l'abolition des Droits de l'Homme, l'adoption du statut des Juifs (les' très nombreux1 juifs d'Algérie se voyant retirer la nationalité française jusqu'en juin 1943, date de l'installation du générai de Gaulle à Alger et la politique de collaboration avec le vainqueur initiée à Montoir !
Ensuite, comment accepter l'idée que de GAULLE ait été « le bourreau des Français d'Algérie » ou le « responsable de l'assassinat de plusieurs milliers de Pieds Noirs»? Non seulement cela ne correspond pas à la réalité des faits s'étant déroulés, mais que faudrait-il dire alors de personnalités qui ont été réellement des « bourreaux» et des « assassins», parfois de centaines de milliers voire de millions de victimes telles que, parmi bien d'autres, Barbie, Eichmann, Heydrich, Kaltenbrünner, Pol Pot, Videla et les généraux argentins, Milosevic, le général Mladic, Taylor, Khadafi, El Assad?
Ces détracteurs, comme les a qualifiés le maire de Nice, sont des « gens haineux» et ont osé scander « assassin» durant La Marseillaise, Le Chant des Partisans ou la minute de silence. Ils oublient également que si le scénario de l'indépendance de l'Algérie s'est dramatisé à partir d'avril 1961, ce fut bien à cause de l'OAS qui pratiqua la politique du pire, multiplia les attentats (y compris en métropole et pas seulement contre le chef de l'Etat au Petit-Clamart et au Mont Faron) contre les partisans du dialogue franco-algérien et les membres de la communauté algérienne afin d'entraîner des actes de représailles et que, si le FLN a bien organisé des attentats ayant fait couler le sang des Pieds Noirs, avant comme après le putsch d'Alger, ces actes « terroristes» n'ont jamais été commandités par le premier président de la République lequel n'a pas tranché seul en faveur de l'indépendance mais s'est appuyé sur prés de 85% de l'électorat (76% en décembre 1961 et 93% en avril 1962).
N'oublions pas, également, que si les « événements de 1954 » se sont déroulés, ce fut également parce que la majorité des Pieds Noirs avaient refusé, depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, tous les projets de réforme qui auraient pu déboucher, comme ce fut le cas un peu plus tard sur le continent africain, sur des situations de décolonisation pacifique comme en Angola, au Mozambique et en Afrique du Sud où, après quelques incidents intercommunautaires, la minorité européenne accepta de perdre son pouvoir politique tout en conservant son pouvoir économique et en continuant, à plus de 80%, à vivre sur place dans une société multiraciale et multiculturelle sans subir le traumatisme du déracinement et de l'exil source d'aigreur, de rancœur, voire de haine pérenne.
Il conviendrait donc de mieux peser le sens des mots avant de polémiquer et, dans un Etat de droit, les médias devraient veiller à ce que des présentations manifestement erronées ou mensongères puissent être équilibrées par des points de vue différents exprimés à côté des propos contestés, ce qui permettrait d'organiser un débat dans la clarté, sinon dans la sérénité.
Jean-Louis PANICACCI (Professeur honoraire de l’Université de Nice)