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08/09/2015

LA CONFRÉRIE DES GUEYEURS DE SAINT LAURENT DU VAR

GUEYEUR DE SAINT LAURENT.jpg

Depuis les origines des temps, le fleuve Var a constitué pour l’homme un dangereux obstacle dans sa progression côtière. Aussi, une étape s’imposait avant cette traversée délicate. Saint Laurent du Var naîtra de cette nécessité géographique.

De ce fait, les hommes occupant le site seront mis à contribution dans l’aide et l’assistance apportées au franchissement du fleuve, et ceci, jusqu’à la construction définitive d’un pont en 1792. 

A l’origine Saint Laurent du Var fut bâti au bord du Var pour en assurer la traversée. 

Rappelons que déjà en 1005 l’abbé de Saint Véran reçut une habitation dans un hameau dénommé Varum, sur la rive droite du fleuve, où Saint Laurent s’est installé par la suite.  

Au XIIè siècle un ermite se rendait chaque année sur les bords du Var avec deux chevaux pour faire passer les pèlerins se rendant à l’abbaye de Lérins. 

La création d’un hospice confié à des religieux va poursuivre cette coutume pendant les siècles suivants jusqu’au XVè siècle. « La barque de l’hospice » assurait alors le passage d’une rive à l’autre du Var.  

Au Moyen-âge, les autorités religieuses soucieuses de faciliter le flux des pèlerins circulant vers Rome et Saint Jacques de Compostelle vont garantir le passage du fleuve.  

L’installation d’un hospice sur la rive droite va satisfaire à cette exigence.  

Au XVeme siècle, après la renaissance du village repeuplé suite aux épidémies et aux pillages, il appartiendra aux nouveaux habitants, venus de la proche Ligurie, d’assurer la traversée du Var. Lorsque Saint Laurent est repeuplé en 1468 par son seigneur l’évêque de Vence, Raphaël Monso, désireux de garantir la sécurité du gué, obligation est faite aux nouveaux venus, de tenir une barque sur le Var pour en assurer le passage. Ces premiers gueyeurs laïques, dénommés « Riveraschi », vont s’organiser en corporation et  maintenir leur activité jusqu’au XIXè siècle. 

« Les gueyeurs ou barquiers doivent être des gens choisis et craignant Dieu 

Qui fréquentent les sacrements et fassent leurs Pâques chaque année, 

Qui portent un « tableau » autour de leur ceinture, 

Qui ai de la pudeur et de l’honnêteté envers les personnes du sexe, 

Qu’ils soient charitables envers les pauvres et traitables envers les autres, 

Qu’ils ne soient points abrutis par le vin pour ne pas se noyer et noyer les autres ! » 

Les Gueyeurs vont s’acquitter de leurs devoirs dans le cadre d’une une véritable confrérie soumise à des règles strictes.  

Néanmoins, au XVIIIème siècle, les services des gueyeurs se dégradent : indélicatesses en tous genres, voyageurs volés et rançonnés, prestations d’un prix exorbitant, litiges et incidents divers conduiront même certains gueyeurs jusqu’à la prison. Cette situation persiste, entraînant les autorités à confier la gestion du passage du Var à un entrepreneur privé.  

En 1760, le traité de paix de Turin impose de nouvelles règles avec un retour de la traversée du fleuve à la charge de la communauté : 

Elle nommera 12 gueyeurs « les plus propres, les plus experts dans cette fonction ». 

Ils se tiendront deux de chaque bord, depuis le lever au coucher du soleil. 

Ils sonderont et marqueront les passages difficiles avec des piquets. Les gueyeurs seront toujours vêtus décemment avec des caleçons ou ceintures  et ne pourront passer les voyageurs lorsqu’il y aura du danger. 

Ils passeront les pèlerins gratuitement. 

Le salaire est de 6 sols d’argent de France. » 

Les gueyeurs disparaîtrons lorsqu’un pont traversera enfin le fleuve de manière  

définitive en 1864. Ils avaient été durant plus de huit siècles les maîtres du fleuve.  

Laissons Smolett les décrire: «Au village de Saint-Laurent, il y a une équipe de passeurs toujours prêts à guider les voyageurs dans le passage de la rivière. Six de ces hommes, les pantalons retroussés jusqu'à la ceinture, avec de longues perches en main, prirent soin de notre voiture et, par mille détours, nous conduisirent sains et saufs à l'autre bord.» 

 Et Papon, dans son «Voyage en Provence», de préciser : «... si l'on ne passe (le Var) ni en voiture, ni à cheval, on s'assied sur l'épaule de deux hommes qui se tiennent l'un contre l'autre». 

Aujourd’hui le souvenir des gueyeurs se perpétue dans le Vieux Village par une modeste rue portant leur nom, elle relie la place de la Fontaine à la rue des Remparts.  

Récemment, en 2000, un rond point au carrefour des rues du 11 novembre, du Point du Jour et de l’Ancien Pont s’est vu paré d’une sculpture représentant une voyageuse à califourchon sur le dos d’un de ces porte-faix, acteurs glorieux de l’Histoire de la cité. 

Ces données historiques fondées sur la tradition locale ne peuvent négliger le plus illustre des gueyeurs, leur patron  Saint Christophe, qui est également celui des porte-faix dont la fête est célébrée le 21 août.  

Aujourd’hui, grâce au « Comité de sauvegarde du vieux village de Saint Laurent du Var » une « Fête des gueyeurs », célébrée en août, conserve la mémoire de ces robustes laurentins qui oeuvrèrent pour leur prochain durant quatre siècles afin d’assurer le passage du Var.  

Les gueyeurs sont une particularité exceptionnelle unique en France dont peut s’enorgueillir Saint Laurent du Var. 

 

Extrait de « Un Peu d’Histoire de Saint Laurent du Var » d’Edmond ROSSI publié aux Éditions Sutton, pour obtenir ce livre dédicacé par l’auteur, contactez : 

edmondrossi@orange.fr