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09/08/2014

LA LIBÉRATION DE SAINT LAURENT RACONTÉE PAR UN TÉMOIN: HONORÉ ODDO

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Voici un témoignage capital sur la libération de Saint Laurent du Var le 27 août 1944, recueilli par le « Souvenir français » auprès de Monsieur Honoré ODDO aujourd’hui disparu. Cette personne, dont la famille est également très connue à Saint-Laurent-du-Var, avait alors 29 ans. Il se rappelle parfaitement cette journée de plein été qui devait lui procurer, comme à toutes les laurentines et à tous les laurentins, une joie facile à imaginer. Il ne peut cependant effacer de sa mémoire la tragédie dont il fut le témoin direct. "Saint-Laurent, nous dit-il, comptait à l’époque un peu plus de 4.500 habitants. Toutefois, après le bombardement du 26 mai, une bonne partie de ceux-ci, surtout les femmes et les enfants, s’était provisoirement réfugiée dans les communes environnantes. Ma femme et nos 3 enfants étaient à Vence». Cela, Monsieur ODDO, qui faisait aussi souvent que possible le trajet aller-retour à vélo, ne l'a pas oublié non plus! Il continue: "on savait que les alliés étaient tout près, puisque Antibes et Villeneuve-Loubet avaient déjà été libérées. Le plus gros des forces allemandes avait quitté St-Laurent environ 2 jours plutôt mais il en restait encore et personne ne pouvait dire si elles allaient livrer combat ou non". Quant aux services publics, ils continuaient à fonctionner tant bien que mal. L’alimentation électrique, en particulier, sauf dans le Vieux- Village, était toujours assurée. Cela aussi, Monsieur ODDO s'en souvient, lui qui travaillait pour Sud-est Electricité, la compagnie qui allait devenir EDF et dont il est retraité depuis plusieurs années. Mais, en ce dimanche 27 août 44, il n'était pas de service. " Pourtant, précise-t-il, en ce temps-là, on ne faisait plus la différence entre les dimanches et les autres jours de la semaine. J'habitais ici depuis 1929 ("ici", c'est la propriété qui s'appelait la Grand’ Vigne et autour de laquelle il n y avait encore que très peu d'habitations). Comme je l'ai déjà dit, on attendait les alliés d'un jour à l’autre et on écoutait la radio qui diffusait des messages de plus en plus nombreux à l'intention de la résistance". A ce moment de notre entretien, Monsieur ODDO nous montre, précieuses reliques que les ans ont rendues fragiles et que nous manipulons, par conséquent, avec précaution, un certificat délivré par la commission militaire locale du Conseil National de la Résistance ainsi qu'une attestation émanant de la subdivision militaire des Alpes-Maritimes. Ces deux documents qui datent de l'immédiate après ­guerre stipulent que " Monsieur Honoré ODDO a servi volontairement et avec honneur dans les FFI de mai 1943 à octobre 1944". "Donc, reprend notre interlocuteur, sans avoir des informations aussi précises que celles dont devaient disposer notre Maire, Monsieur RAVET, ou l'Abbé DECAROLI, le curé de la paroisse ou d'autres résistants comme Messieurs FOATA ou HEBERT, nous savions que notre libération était imminente. De là à dire quand et par où les alliés arriveraient... Dans l'après-midi, il devait être 16 heures, je suis allé faire un tour dans les vignes qui longeaient, d'un côté la départementale 209 devenue l'avenue de la Libération et de l'autre, l'actuel boulevard de Provence. Je suis allé jusqu’à la chapelle qui existe toujours, à la jonction des deux voies où s'arrêtait la vigne. Tout ce terrain appartenait alors à ma famille. Soudain, j’entends un bruit de moteur provenant de derrière ma maison, le long de la 209. Instinctivement, je m'allonge sur le talus bordant la route et, presque tout de suite, je vois arriver un peu plus haut (entre l'actuel croisement OSSOLA-LIBERATION et la chapelle) un half-track précédé d'assez loin par 4 français à vélo. Ils étaient en civil mais deux d'entre eux portaient un fusil en bandoulière et un grand drapeau tricolore. Le drame s'est joué en quelques secondes. On sut par la suite que les Allemands avaient installé une mitrailleuse au pied du monument aux morts qui se trouvait alors dans le jardin public (devenu le square BENES). Il y avait très peu de maisons et à l'abri du petit remblai qu'ils avaient formé, les Allemands pouvaient prendre la route en enfilade. En plus, ils étaient malins et ne se sont montrés qu'au dernier moment, juste pour tirer. Deux des cyclistes -l'un d'eux était Monsieur RAVET, le Maire - ont eu le temps de les voir et se sont jetés à plat ventre sur le côté droit de la route. Moi aussi, j’ai aperçu les Allemands et je n'ai pas bougé. De toute façon, pour les deux autres cyclistes, c'était trop tard. Une seule rafale et ils sont tombés du côté gauche de la route, tués sur le coup. Alors, les Allemands sont partis en courant, avec leur mitrailleuse, en direction du Var, c'était fini. Le Half-track qui était resté en arrière n'a même pas eu le temps de riposter. Je me rappelle qu'un homme m'a rejoint sur la route où j'étais descendu. On nous a demandé d'évacuer les deux corps et je suis vite retourné jusque chez moi où j’ai pris un charreton sur lequel nous les avons chargés tandis que le Half-track se remettait en marche, toujours précédé de Monsieur RAVET et du 4ème cycliste. L'autre homme et moi nous avons remonté la 209 jusqu'à ce qu'on rencontre d'autres véhicules militaires. C'étaient des canadiens qui allaient finir de libérer Saint-Laurent. Les deux tués s'appelaient Gabriel ABONNEL et Jean-Clément LEDIEU. Ils étaient des Vespins. Je ne les oublierai jamais". Saint-Laurent-du-Var n'oublie pas non plus. La ville a fait placer une plaque commémorative en hommage aux deux hommes, le long de l'avenue de la Libération, à l'endroit même où ils tombèrent pour la France et, depuis, toutes les Municipalités la fleurissent chaque année, le 27 août.

Cette année sera célébré le 70ème anniversaire de la libéation de Saint Laurent du Var.

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