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30/11/2015

LA GAUDE JADIS ALAGAUDA...

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DE « ALAGAUDA » À LA GAUDE…

Bien exposé au midi sur une crête dominant la vallée de la Cagne, le village de La Gaude a longtemps hésité au cours des siècles sur un site propice à l'accueillir.

Sa division actuelle entre la haute Gaude, formant le village et la basse Gaude (ancien Trigans) épaulant la colline, atteste encore de cette indécision.

En 1033 et 1062, deux frères - Amic et Lambert de la Gauda - présumés appartenir à l’entourage des seigneurs de Vence, sont représentés comme nantis du fief et de son château primitif occupant le promontoire où s’élèvera la forteresse du XII siècle.

La première mention de Sainte Marie Alagauda avec sa villa (exploitation agricole) apparaît en 1075 dans le chartrier de l'abbaye de Saint Pons.

Un siècle plus tard, on retrouve le nom de La Gaude dans le cartulaire de Lérins qui fait état du don de Bertrand Elgibran aux abbés de Lérins de « terris cultis vel incultis quoe jacent territorio de Corsegolas, et in Buzido, et in Alagaudam » (25 août 1155).

Les habitants qui s'étaient réfugiés vers les hauteurs des Baous pour fuir au Xme siècle les attaques sarrasines reprennent alors possession des basses terres.

Le site d'Alagauda occupe le promontoire destiné plus tard à recevoir le château de La Gaude, curieusement situé aujourd'hui sur la commune de Saint Jeannet. La petite chapelle romane de San Peyre (Saint Pierre) proche de ce tertre devait en constituer l'église paroissiale.

Puis le 16 avril 1242, Guilhem d’Entrevennes, seigneur de Gattières, vend ses droits sur la place de La Gaude à Romée de Villeneuve, baron de Vence, dit Romée le Grand, fils de Giraud de Villeneuve, seigneur des Arcs

Ce premier castrum est confirmé au XIIIème siècle comme Alagauza (Liste des Castra dès 1226), cité en 1235 dans les Statuts de Fréjus, puis en 1251-52 (Enquête de Charles d'Anjou), il relèvera en 1325 de la circonscription administrative de Vence.

En 1250, Paul fils de Romée de Villeneuve devient Seigneur de La Gaude, de Saint-Jeannet et du Trigan. Dans la traduction de son testament, on peut lire: «j'institue formellement mon fils Paul comme mon héritier dans le castrum d'Alagauda et ses dépendances, à savoir le domaine de Saint-Jeannet et du Castellet, et la moitié du Trigan ».

Un acte d'habitation de 1338 laisse ensuite supposer que le castrum a été vidé de sa population après 1325.

Deux calamités sont envisageables : d'une part, l'épidémie de peste qui débute en 1327 et qui décimera la population du premier village d'Aspremont, situé en face d'Alaguaza sur la rive opposée du Var ou encore, la misère et la famine qui en 1330 emporte le tiers de la population du secteur, à la suite de la destruction des récoltes consécutives à six mois de pluie.

La renaissance sera de courte durée, car La Gaude est à nouveau portée "lieu inhabité" au ré-affouage de 1400 (Arch. des Bouches du Rhône B-199, f° XIX) laissant supposer la destruction de la communauté antérieurement à cette date.

Treize autres localités de la Viguerie de Grasse connaîtront le même sort. Un document de 1589 indique que vers 1390 La Gaude est "entièrement ruyné et déshabité à cause des guerres que les comtes de Provence avoient pour rayson du royaulme de Naples et de Cicille ». Il s’agit de la guerre de succession qui enflamme la région et les bords du Var après le décès de la Reine Jeanne.

L'historien local, Boniffacy, attribue à la peste un dépeuplement postérieur en 1470, ce qui n'explique pas sa destruction vers 1390.

Après une première épidémie de 1392 et 1416, la peste réapparait dans notre région frappant par intermittence de 1451 à i470 laissant des coupes sombres dans une population en voie de reconstruction à la suite de la guerre de succession de la reine Jeanne.

Dans son livre sur La Gaude l’historien Emile Boniffacy attribue (page 445) le dépeuplement de l’ancien castrum à la peste de 1470, ce qui n’explique pas sa destruction.

Le document cité décrit le lieu auparavant «habité » et sa « communauté et université régie et gouvernée par des consuls et conseils de la maison commune ».

La Gaude étant porté comme lieu « inhabité » à l’affouagement de 1400, on doit conclure à la destruction de cette communauté et à sa disparition antérieurement à cette date, probablement en 1390.

Les castra d'Alagauza, Triganza, Sancti Johannis (St Jeannet) occupent des lieux distincts sur un vaste territoire couvrant les deux communes actuelles de La Gaude et Saint Jeannet; elles vivront un destin commun dès le XIme siècle au sein d'une même seigneurie.

C’est après la destruction confirmée en 1470 que les rescapés de l’ancien Gauda s’installent dans le voisinage de Trigans où réside une communauté antérieure. Trigans, séparé par un vallon de l’ancien Gauda, est mentionné dès 1042 dans le Cartulaire de l’abbaye de Saint Victor de Marseille. Contrairement à La Gaude qui est le centre de la seigneurie avec son château, Trigans se développe comme une dépendance citée en 1250 avec Saint Jeannet et le Castellet et encore en 1315 dans la liste des anciennes possessions de l'illustre Romée de Villeneuve.

Son essor est freiné par la crise du XIVème siècle et il accueillera à la fin du XVIème siècle, sur l'adret opposé, le nouveau et actuel bourg de la haute Gaude éloigné de son château seigneurial. La renaissance du village sera impulsée par un peuplement de colons génois (acte d’habitation de 1338), avant d'être confirmée en 1599 par Henri IV qui l'érigera en commune distincte de Saint Jeannet.

Le fief appartient dès 1231 à la famille de Villeneuve et accessoirement à ses diverses branches : Villeneuve-Vence, Villeneuve-Thorenc, Villeneuve-Tourrettes et temporairement aux Pisani et aux Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem.

 

EDMOND ROSSI

Écrivain, Historien

 

http://alpazur-edmondrossi.monsite-orange.fr/...

08/10/2015

SAINT LAURENT DU VAR :« LE VICTORIA »,HÔTEL, BAR, RESTAURANT FERME SES PORTES, LA FIN D’UNE INSTITUTION CENTENAIRE

 

L'HOTEL RESTAURANT VICTORIA EN 1906.jpg

 

Récemment, l’hôtel, bar, restaurant « Victoria » de Saint Laurent du Var a fermé ses portes après plus d’un siècle d’existence. La longue présence de  cet établissement mérite de figurer parmi les institutions qui ont marqué la vie sociale de la commune.


Déjà distingué  à ses débuts par la visite de la reine  Victoria d’Angleterre qui aurait fait halte dans ses murs un soir d’orage pour éviter le danger d’une crue soudaine du Var, son nom restera. L’établissement poursuivra son destin  avec vigueur sous la direction de plusieurs propriétaires successifs.

Sa façade et ses terrasses  ornent alors avantageusement les cartes postales témoignant de son intérêt touristique au centre du bourg laurentin.

 

 

1931.jpg

 

Le guide du syndicat d’initiative de la commune le signale ainsi en 1931 ; « Café-Restaurant VICTORIA CHIAPELLO ET FRASCANI propriétaires SAINT LAURENT DU VAR Casse croûte à tout heure, Repas sur commande. Spécialité des vins de Montaleigne et du Piémont. Téléphoner au 7. Prix modérés. »

Avant sa fermeture définitive et durant plus de quarante ans la famille Ramella fit du restaurant du « Victoria » un fleuron gastronomique de la cuisine niçoise et régionale fréquenté par les notables venus y déguster entre autres son fameux stockfisch.

L’histoire est aussi faite de tradition orale, même si parfois s’y mêle la légende, propre à embellir et travestir la réalité.

En 1925, Léon Bertini, gérant de l’Hôtel–Restaurant « Le Victoria » expliquait, tout comme ses prédécesseurs , à qui voulait l’entendre, l’origine depuis 1900, du nom prestigieux de son établissement. « Le Victoria » témoignerait de la venue dans ce lieu de la célèbre reine d’Angleterre à la fin du XIXème siècle.

Cette affirmation méritait d’être vérifiée, si les chroniques n’en font pas état, les circonstances de la vie de la Reine sur la Côte, à l’occasion de ses séjours répétés, accréditent la possibilité de son passage à Saint Laurent du Var.

La Reine effectuera cinq séjours à Nice entre 1895 et 1900, de la mi-mars à la fin avril, avant de s'en retourner ou de partir pour l'Italie à Florence.

Une fois son travail matinal achevé, escortée de son valet hindou enturbanné, elle parcourt le parc Liserb dans une voiturette attelée du célèbre petit âne gris Jacquot. L'après-midi était réservé aux promenades plus lointaines en calèche, escortée de ses highlanders écossais. Elle découvre ainsi la campagne niçoise qu'elle adore pour sa végétation et ses points de vue. La Reine sillonne le bord de mer de Cannes à Menton, et les collines niçoises de Saint-Isidore à Laghet. Gairaut, ces lieux constituent ses buts de sorties préférées. Les auberges où elle va prendre le thé ont conservé le souvenir de son passage en prenant le nom de « Hôtel de la Reine », du « Victoria » ou bien de « Au thé de la Reine ».

C’est à l’occasion d’une de ses promenades au-delà du Var que la Reine aurait fait étape à Saint Laurent du Var.

Aujourd’hui à Saint Laurent du Var, après plus d’un siècle, la mémoire de cette grande reine s’est éteinte, elle affichait son nom : « Victoria » sur l’enseigne d’un des meilleurs restaurants du centre ville.

Edmond ROSSI

LE VICTORIA 1925.jpg

 

 

 

 

 

 

08/09/2015

LA CONFRÉRIE DES GUEYEURS DE SAINT LAURENT DU VAR

GUEYEUR DE SAINT LAURENT.jpg

Depuis les origines des temps, le fleuve Var a constitué pour l’homme un dangereux obstacle dans sa progression côtière. Aussi, une étape s’imposait avant cette traversée délicate. Saint Laurent du Var naîtra de cette nécessité géographique.

De ce fait, les hommes occupant le site seront mis à contribution dans l’aide et l’assistance apportées au franchissement du fleuve, et ceci, jusqu’à la construction définitive d’un pont en 1792. 

A l’origine Saint Laurent du Var fut bâti au bord du Var pour en assurer la traversée. 

Rappelons que déjà en 1005 l’abbé de Saint Véran reçut une habitation dans un hameau dénommé Varum, sur la rive droite du fleuve, où Saint Laurent s’est installé par la suite.  

Au XIIè siècle un ermite se rendait chaque année sur les bords du Var avec deux chevaux pour faire passer les pèlerins se rendant à l’abbaye de Lérins. 

La création d’un hospice confié à des religieux va poursuivre cette coutume pendant les siècles suivants jusqu’au XVè siècle. « La barque de l’hospice » assurait alors le passage d’une rive à l’autre du Var.  

Au Moyen-âge, les autorités religieuses soucieuses de faciliter le flux des pèlerins circulant vers Rome et Saint Jacques de Compostelle vont garantir le passage du fleuve.  

L’installation d’un hospice sur la rive droite va satisfaire à cette exigence.  

Au XVeme siècle, après la renaissance du village repeuplé suite aux épidémies et aux pillages, il appartiendra aux nouveaux habitants, venus de la proche Ligurie, d’assurer la traversée du Var. Lorsque Saint Laurent est repeuplé en 1468 par son seigneur l’évêque de Vence, Raphaël Monso, désireux de garantir la sécurité du gué, obligation est faite aux nouveaux venus, de tenir une barque sur le Var pour en assurer le passage. Ces premiers gueyeurs laïques, dénommés « Riveraschi », vont s’organiser en corporation et  maintenir leur activité jusqu’au XIXè siècle. 

« Les gueyeurs ou barquiers doivent être des gens choisis et craignant Dieu 

Qui fréquentent les sacrements et fassent leurs Pâques chaque année, 

Qui portent un « tableau » autour de leur ceinture, 

Qui ai de la pudeur et de l’honnêteté envers les personnes du sexe, 

Qu’ils soient charitables envers les pauvres et traitables envers les autres, 

Qu’ils ne soient points abrutis par le vin pour ne pas se noyer et noyer les autres ! » 

Les Gueyeurs vont s’acquitter de leurs devoirs dans le cadre d’une une véritable confrérie soumise à des règles strictes.  

Néanmoins, au XVIIIème siècle, les services des gueyeurs se dégradent : indélicatesses en tous genres, voyageurs volés et rançonnés, prestations d’un prix exorbitant, litiges et incidents divers conduiront même certains gueyeurs jusqu’à la prison. Cette situation persiste, entraînant les autorités à confier la gestion du passage du Var à un entrepreneur privé.  

En 1760, le traité de paix de Turin impose de nouvelles règles avec un retour de la traversée du fleuve à la charge de la communauté : 

Elle nommera 12 gueyeurs « les plus propres, les plus experts dans cette fonction ». 

Ils se tiendront deux de chaque bord, depuis le lever au coucher du soleil. 

Ils sonderont et marqueront les passages difficiles avec des piquets. Les gueyeurs seront toujours vêtus décemment avec des caleçons ou ceintures  et ne pourront passer les voyageurs lorsqu’il y aura du danger. 

Ils passeront les pèlerins gratuitement. 

Le salaire est de 6 sols d’argent de France. » 

Les gueyeurs disparaîtrons lorsqu’un pont traversera enfin le fleuve de manière  

définitive en 1864. Ils avaient été durant plus de huit siècles les maîtres du fleuve.  

Laissons Smolett les décrire: «Au village de Saint-Laurent, il y a une équipe de passeurs toujours prêts à guider les voyageurs dans le passage de la rivière. Six de ces hommes, les pantalons retroussés jusqu'à la ceinture, avec de longues perches en main, prirent soin de notre voiture et, par mille détours, nous conduisirent sains et saufs à l'autre bord.» 

 Et Papon, dans son «Voyage en Provence», de préciser : «... si l'on ne passe (le Var) ni en voiture, ni à cheval, on s'assied sur l'épaule de deux hommes qui se tiennent l'un contre l'autre». 

Aujourd’hui le souvenir des gueyeurs se perpétue dans le Vieux Village par une modeste rue portant leur nom, elle relie la place de la Fontaine à la rue des Remparts.  

Récemment, en 2000, un rond point au carrefour des rues du 11 novembre, du Point du Jour et de l’Ancien Pont s’est vu paré d’une sculpture représentant une voyageuse à califourchon sur le dos d’un de ces porte-faix, acteurs glorieux de l’Histoire de la cité. 

Ces données historiques fondées sur la tradition locale ne peuvent négliger le plus illustre des gueyeurs, leur patron  Saint Christophe, qui est également celui des porte-faix dont la fête est célébrée le 21 août.  

Aujourd’hui, grâce au « Comité de sauvegarde du vieux village de Saint Laurent du Var » une « Fête des gueyeurs », célébrée en août, conserve la mémoire de ces robustes laurentins qui oeuvrèrent pour leur prochain durant quatre siècles afin d’assurer le passage du Var.  

Les gueyeurs sont une particularité exceptionnelle unique en France dont peut s’enorgueillir Saint Laurent du Var. 

 

Extrait de « Un Peu d’Histoire de Saint Laurent du Var » d’Edmond ROSSI publié aux Éditions Sutton, pour obtenir ce livre dédicacé par l’auteur, contactez : 

edmondrossi@orange.fr