29/01/2007
SAINT LAURENT DU XIXe SIECLE A NOS JOURS
SAINT-LAURENT DU VAR CONTEMPORAIN
En 1819, Saint-Laurent du Var compte 600 habitants. Le recensement donne une idée de la composition du corps social. Mis à part les 23 employés des Douanes et les six gendarmes, deux catégories se partagent la population :- Les agriculteurs, divisés eux-mêmes en travailleurs et mesnagers (propriétaires)
- Les bourgeois et notables à savoir : un notaire, un lieutenant-juge, un maître-chirurgien, un contrôleur, un receveur des impôts, un brigadier et des employés des Fermes. Peu de marins et pêcheurs, Saint-Laurent conserve sa vocation terrienne.
La Révolution de juillet 1830 ne change rien ; on note simplement l’achat par le maire d’une écharpe tricolore pour 50 francs.
La vie économique se développe grâce au flottage du bois. Deux scieries hydrauliques débitent poutres et planches. Rappelons que de 1822 à 1844, près de 300.000 arbres seront abattus dans la montagne et descendus jusqu’à la Côte en utilisant les crues du Var et de ses affluents, la Tinée et la Vésubie. Trois moulins tournent tant pour l’huile d’olive que pour la farine de blé.
A l’occasion d’une visite de la place en 1690, M. de Grignan - gouverneur de Provence - avait goûté et fait apprécier à sa belle-mère, Madame de Sévigné, le capiteux vin muscat de Montaleigne. Ayant gagné ses lettres de noblesse à la Cour de France, ce grand cru des coteaux laurentins est toujours coté en 1880.
Les cultures maraîchères et fruitières se développent, profitant de la proximité du marché niçois.
Le coup d’état du 2 décembre 1851 de Louis Napoléon Bonaparte provoque une réaction sans suite des Républicains entraînés par un médecin cagnois - le docteur Provençal. La population se maintient dans une prudente réserve et les autorités sont hostiles à un soulèvement. Abandonné par les siens, le docteur Provençal s’exilera le 6 décembre sur la rive sarde.
A cette époque, trois notables français - résidents à Nice - seront enterrés en terre de France à Saint-Laurent du Var :
- En juillet 1832, Desjobert - ancien Consul de France à Naples, gravement malade, se tue d’un coup de pistolet à Nice. Dans cette ville, le cadavre des suicidés est voué à la vindicte populaire, exposé sur une potence au bord du Paillon avec une sentence diffamatoire. Le Consul de France à Nice fait rapatrier le corps du défunt à Saint-Laurent, pour lui éviter ce sort cruel.
- En mars 1838, le général Dufriche de Valazé, fils d’un conventionnel célèbre, s’était distingué pendant la guerre d’Espagne et lors de la prise d’Alger. Il décède à Nice des suites d’une tuberculose pulmonaire. Sa veuve voulant acheter une concession perpétuelle au cimetière de Saint-Laurent pour 100 francs, le Conseil Municipal, déjà choyé par les héritiers de Desjobert devenu un « bienfaiteur », réclame huit fois le prix ! La tombe a aujourd’hui disparu.
- En juin 1848, ce sera au tour du Marquis de Château-Giron, pair de France sous Louis-Philippe, Consul à Nice depuis 1841 qui servit en Vendée sous Marceau.
Lorsqu’en 1860, le Comté de Nice est à nouveau rattaché à la France, un véritable pont de pierre est construit sur le Var. La voie ferrée venant de Marseille l’empruntera et, le 18 août 1864, la première locomotive franchit le Var.
L’éloignement du village par rapport au chemin de fer s’expliquerait par une anecdote révélatrice de la prudente méfiance des Laurentins vis-à-vis du progrès. Lors de la construction de la voie, les ouvriers employés au chantier chapardaient les figues alentours. Pour éviter ce risque, le conseil municipal de Saint-Laurent éloigna la menace vers le bord de mer et les paluds, en refusant le passage du train à proximité du village.
Cette sage précaution n’empêchera pas les destructions dues aux bombardements du pont ferroviaire durant la seconde guerre mondiale. Ceux-ci se succèderont en 1943 et 1944. L’aviation alliée s’attaque au pont du Var les 17 novembre et 18 décembre 1943 ; elle récidive le 2 janvier 1944 coupant le trafic routier. A cette occasion, la passerelle du XIXe siècle est reconstruite. Le 26 mai 1944, la gare est bombardée avec un train de voyageurs à l’arrêt ; de nombreuses victimes seront retirées des décombres.
Les 4 et 7 juin 1944, nouvelle attaque du pont entraînant dix jours d’interruption du trafic ferroviaire. Nouveau pilonnage débordant sur le village les 12 juillet et 6 août 1944, faisant de nombreuses victimes. Au total, 23 bombardements avec ceux précédant le débarquement, bilan : 103 maisons détruites, 782 endommagées, 70 morts et 23 blessés. La petite cité sera déclarée sinistrée à 40 %.
Malgré ces aléas, le chiffre de la population croît de manière spectaculaire tout au long du XXe siècle. 1911 : 2.205 habitants - 1936 : 4.825 habitants - 1954 : 5.623 habitants - 1968 : 10.189 habitants - 1974 : 15.495 habitants - 1978 : 22.160 habitants et de nos jours en 1999, 27.141 habitants.
Les activités économiques du début du XX e siècle sont centrées sur l’horticulture. Cette pratique entraîne une forte immigration d’origine italienne et une modification du paysage par la disparition de la forêt.
La culture de la fleur d’oranger, concurrencée par les autres pays méditerranéens et les essences synthétiques, s’éteindra après la seconde guerre mondiale. Quelques studios de cinéma prospéreront dans l’entre deux guerres (voir chapitre suivant). L’occupation nazie va douloureusement diviser la population : huit Laurentins seront déportés, le double condamnés pour faits de collaboration. Saint-Laurent sera libéré le 27 août 1944 par une colonne de l’armée canadienne.
Après s’être relevé de ses ruines, Saint-Laurent, négligeant le tourisme, va se lancer vers un destin industriel dès 1962, grâce à la création d’une zone située le long du Var. Un développement accéléré de l’urbanisme débute à la même époque : en 1967, ouverture du grand Centre Commercial du Cap 3000, 1976 : passage de l’autoroute, enfin implantation récente d’un port de plaisance. Ces données modernes façonnent le nouveau visage de Saint-Laurent du Var et le préparent à affronter un futur digne de son riche passé.
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22/01/2007
VIVE LA REPUBLIQUE !
Le 23 Avri11848, Honoré Amadieu, capitaine de la garde nationale de St. Laurent, demanda au maire le drapeau de la commune, il monta à Vence mais ne le ramena pas!
Le même jour, le garde champêtre à la faveur des élections passa du côté sarde. Comme il était génois on l'arrêta et on le refoula! Ainsi s'écrivait au jour le jour la chronique du village.Le 19 novembre 1848, St. Laurent en liesse fête la promulgation de la constitution républicaine votée le 4 par l'assemblée Nationale. Le matin: salves; à 10 h., 150 kg de pain sont distribués aux pauvres !
A 14 h., toutes les autorités civiles et militaires de la commune s'assemblèrent à la Mairie, d'où elles se rendirent sur la place publique. Là, le Maire ceint de son écharpe lut « l'acte fondamental » entre deux feux de pelotons du détachement de voltigeurs du 31ème de ligne et de la douane.
Au milieu des cris mille fois répétés de « Vive la République", un cortège se forma entraînant la foule à l'église pour y entendre chanter le « Te Deum »...
Trois ans plus tard, à quatre jours de diligence des affaires parisiennes, le canton de Cagnes comme le reste du département du Var prend part à la lutte des « Blancs » et des « Rouges », c'est à dire les partisans de Napoléon le petit (le Prince Président Louis Napoléon, futur Napoléon III) et les légitimistes, républicains et républicains socialistes.
Selon le Sous-Préfet, les bons cantons favorables aux Blancs sont ceux de la montagne; sont à surveiller Grasse, Cannes, Saint Paul et Cagnes.
Le coup d'état du Prince Président accompli à Paris le 2 décembre 1851 à 2 h. du matin est confirmé à Cagnes et Saint-Laurent comme dans tout l'arrondissement de Grasse par l'affichage d'un décret lapidaire le 3 au matin.
On discute ferme dans les auberges de Saint-Laurent, les Républicains du canton se consultent pour une éventuelle riposte. Pour des raisons opportunistes, ceux de Grasse conseillent l'attentisme et prêchent la démission à leurs amis de Cannes et Vence.
Une forte personnalité le Docteur PROVENÇAL, militant républicain cagnois, n'accepte pas la passivité qui lui est recommandée.
Bien que convoqué à Grasse le 3 décembre, il passe la frontière, se rend à Nice pour contacter un émigré républicain Mathieu, ex maire de La Garde Freinet.
Le 6 décembre au soir, armé de son fusil de chasse, le ruban rouge qui lui sert aux saignées enroulé autour de son chapeau, il rassemble une petite troupe d'hommes de Cagnes, Saint-Laurent et Vence, médiocrement pourvus d'armes.
Le groupe se dirige sur les bords du Var, au quartier de La Baronne, où ils espèrent l'arrivée d'une colonne de réfugiés français venant de l'autre rive.
Le Var est en crue, le renfort ne viendra pas.
Les quelques hommes se débandent devant la réserve et l'hostilité des habitants et des autorités du voisinage.
Les maires de Saint-Laurent, Cagnes et La Gaude refusent toute idée de soulèvement armé. Le détachement militaire de Saint-Laurent et les fonctionnaires des douanes demeurent fidèles au Gouvernement.
Le Docteur Provençal, abandonné de tous, s'enfuit aux Plans de Gattières où un passeur lui fait gagner la rive sarde: « Je passais à minuit, par un froid glacial, sur les épaules d'un campagnard de Gattières, Marcellin Nirascou, échappant ainsi à la fusillade de toute la brigade de douane et la Garde Nationale bonapartiste de cette bourgade, mise à ma poursuite ».
Ainsi se termina ce que le Sous-Préfet de Grasse et le Consul de France à Nice appelèrent « la colonne insurrectionnelle du Var ».
Le lendemain 7 décembre, un dimanche au matin, César Provençal, fut appréhendé par les carabiniers sardes, au bord du Var, au pied d'un arbre où il avait dormi quelques heures. Il fut conduit en prison pour franchissement clandestin de la frontière. Il devait connaître les premiers temps difficiles de l'exil politique.
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15/01/2007
UNE VISITE PAPALE A SAINT LAURENT
C'est le 7 août 1809 que Pie VII arrivait à Nice, où il devait poursuivre son voyage, Bonaparte le faisant conduire à Savone. Durante, dans son livre « Histoire de Nice » nous donne des détails sur la traversée du Var par le Pape. Cet auteur cite Jean Sauvaigo le Conseiller de préfecture qui avait accompagné le Pape en 1809 et 1812 lors de sa traversée du département.
« Vers les onze heures du matin, l'auguste voyageur arriva au pont du Var; il fallut mettre pied à terre parce que le passage se trouvait délabré. Pie VII n'avait à sa suite que le cardinal-prince Pamphili-Doria, son compagnon d'exil et deux camériers. Le soleil était brillant, la chaleur excessive... Un bourgeois (Antoine Buere, orfèvre) n'écoutant que son cœur s'élance au devant du St. Père et lui présente son parasol. Le vénérable pontife sourit, il lui accorde l'honneur de l'accompagner dans la traversée du pont dont l'étendue est considérable.
« Tout à coup, au milieu. du trajet, arrivent la reine d'Etrurie et l'Infant, son fils, accompagnés de l'évêque (la reine d'Etrurie et son fils étaient exilés par Napoléon à Nice). Ils se précipitent ensemble aux pieds du St. Père, les mouillent de leurs larmes, mais ils ne peuvent articuler une seule parole, tant ils sont suffoqués par la douleur. Le Pasteur des Fidèles entend ce langage expressif, il prend dans ses bras le jeune prince, le soulève vers le ciel, il semble implorer la fin de ses infortunes. Jamais scène ne fut plus attendrissante, jamais époque ne mérite plus d'être conservée dans nos annales. Arrivé sur le territoire -du département, le Pape remonta en voiture et suivit avec rapidité la route de Nice, où il fit son entrée à l'heure de midi ».
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