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20/10/2012

A SAINT LAURENT DU VAR, DENISE ROSSI UNE FIGURE EMBLÉMATIQUE DE L'ÉCOLE

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DENISE ROSSI : UN TIERS DE SIECLE DANS LES ECOLES LAURENTINES

De sa nomination à Saint Laurent en 1960 à sa retraite en 1987, l’institutrice et directrice a vu passer dans sa classe près de 800 petits Laurentins.

Portrait d’une figure de la commune

« Je n'ai jamais supporte qu'un enfant me quitte fâché. J'ai toujours été sérieuse et sévère dans le travail. Quand j'avais des remarques à faire, je les faisais. Mais je terminais la journée sur du positif. Les enfants devaient venir contents à l'école. »

Denise Rossi est devenue à sa manière une « figure» de la commune, En 33 années d'enseignement et de direction d'école, en quasi-totalité à Saint-Laurent, elle a vu passer dans sa classe près de 800 petits Laurentins. Impossible de sortir dans les rues de la ville sans rencontrer un an­cien élève.

« J'ai par exemple eu le plaisir d'avoir dans ma classe le pre­mier adjoint au maire actuel Léopold Mayen, qui vient tou­jours gentiment m'embrasser.» Denise est fière de ses élèves. « Il y a eu des grosses têtes. Un garçon est devenu un grand trader international, la sœur du docteur Marcucci sera chirurgien de la main à Caen. »

Mais Denise était attachée à tous ses élèves.

« Je n'ai pas eu d'enfants. C'étaient mes enfants. »

Elle se souvient être interve­nue contre le mariage d'une de ses élèves maghrébines à 14 ans par son père.

« Elle avait peur, cette petite. J'ai remué ciel et terre. Ils ont fini par l'enlever à son père pour empêcher qu'il la marie. »

Née en 1932, Denise (Lebrun à l'époque) est arrivée à Saint ­Laurent à l'âge de quatre ans. Sa famille avait quitté Paris à cause de la santé d'un de ses frères, atteint de tuberculose.

Quand la guerre a éclaté, elle avait 8 ans et était écolière au quartier de la gare puis au village (à gauche sur la photo).

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« Des années noires, dit-elle. En 1942, mon père est mort d'une longue maladie, laissant ma mère veuve avec trois enfants et de petits moyens. À dix ans, j'ai passé le concours des bourses pour pouvoir entrer au lycée de filles de Nice. Comme mon collègue et ami Louis Pel­legrin dans la même promotion, mais chez les garçons. » Pendant la guerre, sa maison est éventrée par un bombardement. Heureusement seul son frère s'y trouvait, à l’abri dans la cave.

Finalement, Denise ne sera pas assistante sociale comme elle le voulait au départ.

« J’ai fait une année d’école de commerce à Magnan. On m’a dit de passer le concours de prof, mais ça ne me disait rien du tout.  Sur proposition de Virgile Barel (1), j'ai travaillé un an comme journaliste au quotidien. "Le Patriote” Je suis tombée sur une annonce pour le recrutement d'institutrices assistantes. À l’époque, on avait grand besoin d'instituteurs. » C'est ainsi qu'elle devient ins­titutrice en 1954, année où elle épouse Edmond Rossi, lui aussi communiste, qu'elle a rencontré au « Patriote » où il tra­vaillait également comme journaliste. Elle débute dans l'arrière-pays, puis effectue plusieurs remplacements dans le département avant d'être nommée en 1960 à l'école du centre (2) garçons puis filles. Elle devient directrice, « L'école avait six classes. Deux ans après, elle en était à onze. »

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En 1978, elle est nommée di­rectrice de l'école Castillon qui vient d'ouvrir aux Pugets. « Juste avant la rentrée, l'ar­chitecte m'a remis une boîte à chaussures pleine à ras bord de clés. Devant mon air effaré, les employés des services techni­ques de la mairie m'ont assuré qu'ils m'aideraient à trouver les bonnes serrures. »

Quand l’école Castillon2 est construite, elle refuse d’être la directrice de l’ensemble du groupe scolairedirectrice de l'ensemble du groupe scolaire.

« Je ne voulais pas être dé­chargée totalement  Je voulais continuer à enseigner. J'ai été la première directrice d'école de la commune à avoir une photocopieuse et des ordina­teurs en classe. Quand je vou­lais obtenir quelque chose, je demandais, parfois avec des contreparties. La bibliothèque, je l'ai obtenue en acceptant un centre aéré dans l'école. »

En 1987, elle prend sa retraite. Mais elle devient déléguée dé­partementale de l'Éducation nationale pendant quelques années jusqu'en 2010.

« Pour continuer à défendre l'école laïque. »

Elle garde d’excellents souvenirs de ses années d’enseignement et de direction d’école.

« On préparait de belles fêtes pour les fins d'année scolaire. À Noël aussi, et on me faisait des cadeaux surprises ... »

Presque élue, elle renonce à être conseillère municipale

Denise Rossi a failli deve­nir conseillère munici­pale. « Quand on est enseignant et directeur d'école, on est très connu et on représente un po­tentiel relationnel et élec­toral. »

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Candidate sur une liste d'union de la gauche en 1977 et en position d'être élue à l'issue du premier tour, elle cède sa place au deuxième tour à François Daniel, qui de­viendra conseiller muni­cipal d'opposition face la municipalité Mo­schetti. Pour ne pas voir son temps et son énergie monopolisés par la politique, et pouvoir se con­sacrer pleinement à son métier et à son foyer. Malgré des opinions politiques divergentes, elle garde un bon souvenir du maire Marc Moschetti. « Lui et ses adjoints aux écoles, M. Natter puis M. Revel, ont toujours fait le maximum pour les éco­les. À chaque fois que j'al­lais le voir en mairie en délégation avec les pa­rents d'élèves, il ne man­quait jamais de rappeler qu'il m'avait connue pe­tite, qu'il allait à l'école avec mes frères, qu'il esti­mait beaucoup ma mère. Une vraie scène de théâ­tre! »

Du maire Léon Bérenger en revanche, elle garde un souvenir amer. « J'ai vu ma mère pleurer parce qu'elle manquait d'argent. Le maire l'avait licenciée. Et il avait écrit à l'employeur de mon frère Jacques pour, se plaindre qu'il faisait de la politi­que. »

LAURENT QUILICl

Iquilici;nm@gmail.com

1. -Instituteur communiste devenu député du Front populaire avant la guerre, puis emprisonné sous Vichy, il était à la tête de l'administration de la ville de Nice à la Libération.

2. - Devenue Michelis 1

  

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13/10/2012

SAINT LAURENT DU VAR DURANT LA GUERRE 1939-1945, LE RAVITAILLEMENT

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Le département des Alpes-Maritimes subit pendant la guerre de nombreuses pénuries de denrées alimentaires. Les problèmes de transport et le fait que la région ne produise pas des quantités suffisantes en sont les causes.

Le ravitaillement et la production agricole ont tenu une place très importante dans l'activité économique de St Laurent durant cette période. En effet, St Laurent était un village à vocation agricole. On surnommait la ville le « jardin de la Côte d'Azur » en raison des nombreuses exploitations horticoles et maraîchères.

L'instauration des cartes d'alimentation le 6 Août 1940 et la constante augmentation de la liste des produits rationnés favorisèrent le développement du marché noir et du troc. Les restrictions eurent pour conséquences une augmentation des vols. Ainsi, lors de ses délibérations du 15 Mars 1941, le conseil municipal note la « nécessité de nommer un troisième garde champêtre car la population augmente toujours et le service de police est insuffisant, vu les nombreux vols commis dans les propriétés rurales. »

St Laurent accueillait ses voisins niçois désireux d'acheter des légumes. Jacques Auvare rapporte que son père traversa la ville de Nice durant la nuit pour aller acheter des pommes de terre à un agriculteur laurentin. Celui-ci lui accepta. Cela permit à la famille Auvare d'apaiser sa faim et à l'agriculteur de gagner de l'argent. Il est sûr que des petites richesses se sont créées par ce biais.

Même quand ils vendaient leurs produits de façon légale, les agriculteurs avaient des trucs pour gagner plus d'argent. Mme Mathieu raconte que ceux qui vendaient leurs légumes au poids n'hésitaient pas à ajouter une quantité non négligeable de terre. Ainsi, quand on achetait un kilo de tomates par exemple, on achetait bien pour un poids d'un kilo. Mais celui-ci comprenait une bonne dose de terre, en plus des tomates. Les agriculteurs y gagnaient et les clients étaient lésés. De toutes façons, ces derniers n'avaient pas tellement le choix.

Face à tous ses excès, la municipalité prit des décisions énergiques pour tenter de réglementer le commerce des denrées alimentaires. Le 23 Avril 1940, puis le 10 Juillet 1940, le conseil municipal prit un arrêté concernant la fabrication et la vente du pain Le second arrêté obligeait la vente de pain à se faire au poids. Le 13 Septembre 1940, un arrêté fixait le prix de vente du lait. Louis Ravet prit deux arrêtés pour lutter contre le marché noir. Le premier, le 20 Septembre 1941, interdisait les achats à la propriété à qui que ce soit, sur tout le territoire la commune. Le maire était le seul à pouvoir délivrer une autorisation pour les achats familiaux à la propriété. De plus, seul le Syndicat Agricole de St Laurent du Var était habilité pour effectuer le transport des producteurs et de leurs produits. Ce contrôle par Louis Ravet fut jugé excessif. En effet, il était pratiquement la seule personne à disposer du pouvoir décisionnel à propos de la vente de produits agricoles. Etant maire et président du Syndicat Agricole, tout le système reposait sur lui, selon le premier arrêté. C'est pour cette raison que le secrétaire d'Etat au ravitaillement écrivit au Préfet des Alpes Maritimes, le 20 Octobre 1941:

« Le Maire de Saint-Laurent-du-Var a cru devoir prendre, le 20 Septembre 1941, un arrêté qui crée un monopole d'achat en cultures de fruits et légumes sur le territoire de sa commune, au profit du Syndicat Agricole Local dont il est le Président.

Dans l'état actuel de la réglementation, ce texte constitue, à mon sentiment, un abus de pouvoir. En effet, c'est au Bureau Départemental de Fruits et Légumes qu'il appartient, suivant vos instructions et sous votre contrôle, de déterminer quels sont les grossistes expéditeurs habilités à effectuer leurs achats directement à la Production.

En conséquence, j'ai l'honneur de vous demander de vouloir bien ordonner à ce magistrat municipal de rapporter l'arrêté précité et, si vous le jugez utile, donner des ordres au Bureau Départemental de Fruits et Légumes pour que le ramassage des fruits et légumes soit réorganisé en vue d'obtenir le meilleur rendement possible. »

Le Maire dut certainement se conformer aux directives du secrétaire d'Etat. Il prit un second arrêté, le 10 Janvier 1942. Son but était de réduire le marché noir pratiqué avec les niçois. L'article 1 interdisait « aux commerçants, détaillants ou autres, de vendre des légumes et fruits à d'autres personnes que celles ayant leur domicile à St Laurent du Var ». Malheureusement, en dépit de cette politique volontariste, le marché noir continua. Lors des délibérations du 12 Juin 1943, le conseil municipal ne put qu'avouer son manque d'efficacité. Il souligne la « mauvaise volonté » de nombreux commerçants qui se livrent au marché noir, au détriment de leurs concitoyens laurentins.

Pour la municipalité, il n'est pas normal que les habitants de St Laurent ne puissent pas bénéficier de légumes frais. Cette situation est d'autant plus difficile à vivre qu'un arrêté existe bel et bien (celui du 10 Janvier 1942). Mais le maire ne peut que déplorer le fait qu'il ne soit pas respecté et appliqué. Il est conscient qu'il est difficile de résister à la tentation du marché noir, surtout quand la demande est si importante. Le conseil note que « sur 300000 habitants de la Rive droite du Var, 20000 peuvent acheter à la propriété ». Il est clair que les agriculteurs ont de quoi hésiter : fournir normalement les 5000 habitants de St Laurent ou faire du marché noir avec près de 20000 niçois intéressés ?

Dans ses délibérations, le conseil municipal rappelait qu'il se devait d' « empêcher la famine qui nous menace (...) ». Cela montre à quel point les niçois étaient privilégiés par les agriculteurs au détriment des laurentins. La municipalité craignait même que cette situation dégénère. Il fallait « éviter que les citadins se dressent contre les ruraux ». Cette tension était exacerbée par le fait d'être défavorisé par rapport aux niçois. De plus, cet état de fait était dû aux agriculteurs laurentins qui préféraient le marché noir à la vente normale à leurs concitoyens.

La municipalité prit d'autres initiatives pour permettre aux habitants d'avoir un minimum de nourriture. Une soupe populaire pour les enfants fut créée et dura jusqu'à ce que la destruction par les bombardements d'Août 1944 du bâtiment où la soupe était servie.

Les difficultés d'alimentation perdurèrent même après la libération de la ville. Des mesures furent encore une fois prises pour favoriser un bon approvisionnement. Le président du Comité Local de Libération, Eugène Provençal, dut prendre des mesures, d'autant que la presse avait annoncé que le Préfet autorisait les niçois à se ravitailler à St Laurent du Var. Or, les laurentins avaient toujours les plus grandes peines pour se ravitailler en légumes dans leur cité. Il n'y avait effectivement aucun légume en magasins, à cause de « la pénurie des transports et la sécheresse occasionnée par la destruction des canalisations d'eau par les bombardements.»

M. Provençal proposa donc de créer à St Laurent du Var un marché de détail de fruits et légumes. Par conséquent, les agriculteurs, les laurentins et les niçois devaient y trouver leur compte. Le marché étant réglementé, le marché noir devait être supprimé.

Les laurentins avaient accès au marché de façon prioritaire car, de 7 heures à 9h30, seule la population de St Laurent du Var pouvait y acheter des produits. Les voisins (niçois et autres) pouvaient venir de 9h30 à 12h.

Malgré cette création qui devait régler en partie les problèmes de ravitaillement, l'alimentation des laurentins n'était certainement pas très copieuse. Dans ses délibérations du 15 Octobre 1944, le C.L.L. décida «à l'unanimité la mise en adjudication des olives du square public » pour « sauvegarder les ressources de la commune si minimes » fussent-elles ! Ce même jour, M. Provençal indiqua qu'il avait écrit au Préfet pour lui signaler que la ville n'avait pas bénéficié de distributions de viande. Le président du C.L.L. était indigné que St Laurent fut oubliée alors que tout le canton et Nice avaient profité de ce type de distribution.

Extrait du Mémoire d'histoire de Jérémy Thomas

Le mémoire de Jérémy Thomas « Saint Laurent du Var Alpes Maritimes »(Réf : M.M.622.1.THO.1999) esr consultable au « Musée de la Résistance » à Nice La Plaine 1 Bât A2 Boulevard Maurice Slama 06200 Nice Tél : 04 93 81 15 96

03/10/2012

SAINT LAURENT DU VAR DURANT LA GUERRE 1939-1945, LA POPULATION FACE À L'OCCUPATION

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Relations entre la population, les ressortissants italiens et la menace fasciste

Etant donné sa situation géographique et le contexte international, notre région devait craindre une attaque italienne. De ce fait, la tension avec la population originaire de ce pays augmenta. L'incident de la Casa Italiana à St Laurent est représentatif de cette nervosité. Une bagarre éclata entre les personnes réunies ce 13 Avril 1939 au Dopo Lavoro et des réservistes. Les raisons de cet affrontement sont relativement floues. « L'Eclaireur de Nice et du Sud-Est » et « Le Petit Niçois » apportent deux versions différentes.

Dans son édition du 15 Avril, le premier indique qu' « un secrétaire du Consulat d'Italie, M. Jean Piergili, était venu de Nice pour retirer les cartes d'identité à la vingtaine de ses compatriotes rassemblés afin de faire établir les passeports leur permettant de regagner la mère patrie. » Le journal ajoute aussi que les personnes réunies « ne se gênaient guère, au cours des conversations, pour approuver la politique mussolinienne ». L'Eclaireur les qualifie plus loin de « fascistes » mais la raison de la réunion semble plutôt être la visite de Jean Piergili. Le journal n'indique pas qu'il était venu pour faire de la propagande fasciste. Sa venue ne semble être motivée que par des raisons administratives.

« Le Petit Niçois » du 15 Avril n'évoque pas le but de la visite de M. Piergili. Il mentionne sa présence en temps qu'envoyé spécial du « Consulat à la réunion de Saint-Laurent-du-Var ». Il semble sous-entendre qu'avait lieu à la Casa Italiana une réunion fasciste. En effet, selon le journal, il n'y a pas de raison particulière à cette assemblée. La Casa Italiana, selon le Petit Niçois, apparaît donc comme un lieu de propagande fasciste.

Dans les deux cas, les personnes présentes au Dopo-Lavoro de St Laurent sont définies par le terme « fascistes ». Ce jugement est un peu hâtif. Il est vrai que le Dopo-Lavoro est une création fasciste visant à encadrer la population. Cependant, fallait-il être fasciste pour s'y rendre pour demander un passeport ? La réponse est non. Il est possible que certaines personnes y aient affirmé leurs opinions ou soutenu Mussolini. Mais le Dopo-Lavoro permettait également aux ressortissants italiens de se procurer certains produits ou documents officiels. La description des incidents varie encore selon les journaux. « Le Petit Niçois » insiste sur les provocations des italiens de la Casa Italiana : « A ce moment — paraît-il — un Italien se serait présenté devant la porte, aurait brandi un stylet et aurait crié : « S'il y en a un qui a du courage, qu'il vienne. » Ce fut alors la ruée vers l'immeuble. »

« L'Eclaireur » atténue un peu les intimidations italiennes. Il décrit : « Le jeune Charles Berzegio se tenait menaçant, à côté de son père, un couteau à la main. C'est ce qui déclencha la bagarre. ».

Il y a -bien sûr- derrière ces descriptions la volonté de diminuer ou d'augmenter la responsabilité italienne des incidents.

Les journaux apportent aussi deux visions quelque peu différentes sur l'action du maire. « L'Eclaireur », peut-être désireux de faire passer les italiens pour des victimes, note que «M. Louis Bènes, maire de Saint-Laurent-du-Var, président du Conseil d'arrondissement, prévenu harangua les manifestants. Après avoir regretté et désapprouvé l'activité des ressortissants italiens, il exhorta ses concitoyens au calme et à la sagesse. ». Dans « Le Petit Niçois », le Maire n'apparaît pas comme un partisan des manifestants mais simplement comme un arbitre. Le journal veut peut-être mettre en avant le rôle théorique d'un maire qui doit tenter de rester neutre dans ce genre de situation. Par conséquent, il indique que «M. Bènes, maire de Saint-Laurent-du-Var, était avisé et accourait devant la « Casa Italiana » pour exhorter le monde au calme. ».

Cet incident fait apparaître de nombreuses tensions existant déjà plusieurs mois avant la guerre. L'état d'esprit de la population de St Laurent a dû être marqué par cet événement pendant les mois qui ont suivi et encore plus au début de la guerre. En effet, la colonie italienne était très importante dans la population locale. Cette dernière pouvait avoir des doutes sur l'attitude qu'auraient les ressortissants italiens si l'Italie déclarait la guerre à la France.

Ces craintes furent dispersées lors de l'entrée en guerre de l'Italie. Il n'y eut pas de soulèvement anti-français. Cela peut s'expliquer par la présence en France d'italiens qui avaient fui le régime de Mussolini. La bonne intégration de la population italienne peut aussi être une explication. L'échec de l'armée de Mussolini face à la ligne Maginot du département put également décourager les velléités de révoltes des ressortissants italiens.

Après le débarquement en Afrique du Nord, l'Italie occupe la zone sud. Les relations avec les soldats italiens ne laissèrent pas de très mauvais souvenirs aux laurentins. En effet, les italiens n'arrivèrent pas en vainqueurs. C'est logique dans la mesure où ils n'avaient pas réussi à passer la ligne Maginot des Alpes. Les soldats placés à cet endroit furent les seuls de l'armée française à ne pas avoir été battus. Les soldats italiens n'étaient pas craints. C'est en partie pour cette raison que leur arrivée « indifféra » les laurentins. Jean-Louis Panicacci parle même de mépris des azuréens pour ces soldats.

Tous les témoignages insistent sur les liens relativement « amicaux » qui se tissèrent entre la population originaire d'Italie et les soldats. Il ressort des entretiens que les soldats n'étaient pas très contrariants et qu'ils n'avaient pas « d'intentions hostiles».

Evidemment des Italiens aidèrent, plus ou moins concrètement, les soldats d'occupation. Mais l'occupation italienne ne semble pas avoir tellement blessé les laurentins.

L'occupation allemande

On ne peut pas dire de même en ce qui concerne l'occupation allemande. Peut-être l'occupation italienne fut-elle considérée comme plus correcte, à cause de la comparaison avec celle effectuée par les Allemands. Celle-ci a été beaucoup moins courtoise. Il est vrai que le contexte n'est pas vraiment le même : les Allemands ne sont plus autant soutenus par l'Italie depuis le renversement de Mussolini. Leur politique se radicalise à tous points de vue. Pour ces raisons, l'occupation allemande a été moins bien acceptée. Certes, St Laurent n'a pas connu d'exécutions publiques en représailles. Mais, à partir de Novembre 1943, la ville commence à être bombardée, soit seulement deux mois après l'arrivée des allemands. Cette proximité dans le temps peut expliquer le jugement de la population vis à vis de l’occupation allemande. Pour les laurentins, avec les allemands, commence une période plus dure, celle des raids aériens anglo-américains. C'est peut-être à ce moment là que la guerre a touché réellement les laurentins. Ces premiers combats, les premières victimes civiles, les premières destructions ont bouleversé l'existence de la population. L'exposition réalisée pour le cinquantenaire de la libération souligne que « les relations avec l'occupant allemand sont tendues. Les pillages de propriétés et les saccages occasionnés, la destruction de vergers, entretiennent des tensions avec la population laurentine ». Toutefois, les documents concernant cette occupation très rares pour confirmer ces actes. La plupart est liée aux agissements des soldats italiens (pillages, vols...).

C'est peut-être plus les événements qui se sont produits durant l'occupation allemande qui ont marqué les habitants de St Laurent que les actes des nazis. La population n'a pas trop souffert des actions des allemands. Monsieur et Madame Dalselme furent déportés, malgré la proposition d'aide de M. Ravet. Monsieur Gaston Dalselme refusa, pensant qu'il ne risquait rien. Il mourut dans les camps, sa femme survécut.

Extrait du Mémoire d'histoire de Jérémy Thomas

Le mémoire de Jérémy Thomas « Saint Laurent du Var Alpes Maritimes »(Réf : M.M.622.1.THO.1999) esr consultable au « Musée de la Résistance » à Nice La Plaine 1 Bât A2 Boulevard Maurice Slama 06200 Nice Tél : 04 93 81 15 96