21/02/2011
PRISONNIERS ET ESCLAVES DES BARBARESQUES
Le 17 juillet 1623, le prieur de Saint Laurent Gaspard Bertrand nous apprend qu’au matin des pirates turcs venus d’Alger, conduits par deux renégats provençaux, débarquèrent de neuf galères à l'embouchure du Var.
Les « barbaresques » ravagèrent la campagne niçoise y brûlant la forêt et 40 maisons. Des habitants de Saint Laurent en route pour Nice fuirent le massacre et les violences en se réfugiant dans la tour des Serres destinée à cet effet sur la rive gauche du Var. Là, ils résistèrent un temps aux assauts des pirates, une partie des familles qui y avaient trouvé refuge périrent dans les flammes ou furent faits prisonniers.
Ainsi une jeune fille, Viviane Bartholomeire tenta d’échapper aux flammes en sautant d’une fenêtre bien qu’assommée elle fut capturée et transportée dans une des galères…
En 1634, on estime à 36 000 par an le nombre de captifs blancs ramenés au Maghreb pour être vendus comme esclaves. Si les hommes constituent une main d’œuvre utile les femmes sont, elles, destinées aux harems. Les razzias conduites pour alimenter ce sinistre commerce se poursuivront jusqu’à la conquête de l’Algérie en 1830.
Dans son « Candide » Voltaire inspiré par un récit de Régnar, un confrère en
littérature ancien prisonnier des Barbaresques, rapporte les mœurs abjectes des
pirates pourvoyeurs d’esclaves blancs. « Aussitôt on les dépouilla nus comme des singes, et ma mère aussi, nos filles d'honneur aussi et moi aussi. C'est une chose
admirable que la diligence avec laquelle ces messieurs déshabillent tout le monde.
Mais ce qui me surprit davantage, c'est qu'ils nous mirent à tous le doigt dans un endroit où nous autres, femmes, nous ne laissons mettre d'ordinaire que des canules. Cette cérémonie me paraissait bien étrange, voilà comment on juge de tout quand on n'est pas sorti de son pays. J'appris bientôt que c'était pour voir si nous n'avions pas caché là quelques diamants. Vous concevez assez tout ce que nous eûmes à souffrir dans le vaisseau corsaire. Ma mère était encore très belle, nos filles d'honneur, nos simples femmes de chambre avaient plus de charme qu'on n'en peut trouver dans toute l'Afrique. Pour moi, j'étais ravissante, j'étais la beauté, la grâce même, et j'étais pucelle. Je ne le fus pas longtemps. »
Voici le témoignage oculaire du Marseillais Laugier de Tassy qui a résidé longtemps à Alger :
« Quant aux esclaves du gouvernement, le Dey en prend un certain nombre des plus jeunes et des mieux faits, pour lui servir de pages. Ceux-ci sont bien pourvus et bien vêtus. Ils reçoivent d'ailleurs assez souvent des présents considérables de gens qui ont affaire à la Cour. Les autres enfin, logent dans des bagnes où l'on a soin de les enfermer tous les soirs. Ceux-là ne sont pas négligés non plus. Ils ont trois petits pains par jour, un petit matelas et une couverture. Il y a aussi une chapelle dans chaque bagne. »
Un Peu d’Histoire… évoque quelques moments du passé tumultueux de Saint Laurent du Var. De l’Antiquité à nos jours ces 70 chroniques illustrées permettent un survol varié propre à éclairer l’histoire de la région bien au-delà de celle d’un simple village provençal placé à l’embouchure du Var. Avant 1860, Saint-Laurent-du-Var était la première bourgade de France en Provence, carrefour historique avec le comté de Nice. Aujourd’hui ville construite entre mer et collines, elle s'étire face à Nice le long de la rive droite du Var. Cité moderne, elle n'en oublie pas pour autant ses racines qui font la fierté de ses habitants. Le témoignage le plus probant de cette pérennité du passé reste sans aucun doute le Vieux-Village, avec ses rues pittoresques et son église romane. Grâce à ces chroniques, Edmond Rossi nous entraîne à la découverte de l’Histoire passionnante de Saint-Laurent-du-Var. Edmond Rossi est depuis son plus jeune âge passionné par l’histoire du Pays d’Azur. Auteur de nombreux ouvrages, il présente régulièrement des chroniques historiques dans le quotidien Nice Matin et sur les ondes Radio France Bleu Azur. Connaître le passé de la région des Alpes Maritimes ?D’après le livre« Un Peu d’Histoire de Saint Laurent du Var » (Editions Sutton) pour commander cet ouvrage illustré et dédicacé de 22 € : téléphoner au 04 93 24 86 55
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14/02/2011
NORIA, UNE PARTICULARITÉ DU MIDI
UN PEU D’HISTOIRE, A PROPOS DE LA NORIA…
L’actualité cagnoise a remis au goût du jour la noria à propos de celle située jadis au quartier du Béal, puis déplacée pour permettre l’implantation immobilière, celle-ci devrait être réinstallée dignement ailleurs, comme un témoignage de notre patrimoine local.
Dans le passé les norias étaient nombreuses sur le territoire de Cagnes, jusque dans les années 80, une d’elle était visible sur le bord de la RN 7, au quartier des Vespins.
Une noria est une machine hydraulique qui constitue l'ancêtre des centrales hydrauliques modernes. La noria (mot d'origine arabe) mue par un manège, était connue des Romains, car l'irrigation était une nécessité déjà ancienne dans les régions semi-arides nouvellement conquises.
Elle sert à élever de l'eau et fonctionne suivant le principe du chapelet hydraulique. C'est une grande roue à ailettes installée sur un cours d'eau et actionnée par le courant. Un chapelet de godets fixés à cette roue élève et déverse l'eau dans un aqueduc associé qui la distribue.
Dans les zones sans cours d'eau, comme l’était la campagne cagnoise, les norias étaient aussi utilisées pour remonter l'eau des puits, et ainsi irriguer les cultures. Dans ce cas, c'était le plus souvent un cheval, un mulet ou un âne qui, les yeux bandés, faisait tourner la roue.
La noria (de l'espagnol noria, de l'arabe na'ora) est un appareil destiné à élever l'eau grâce à des godets, attachés sur une corde ou chaîne sans fin, qui plongent renversés et remontent pleins. Cette machine hydraulique élévatoire consiste en une corde ou une chaîne sans fin tournant sur un tambour placé à la partie supérieure et à laquelle sont attachés des seaux ou des godets.
On distingue deux sortes de norias celle où le seau, incliné par un arrêt, verse avant d’avoir passé sur la roue supérieure et celle où le seau verse en passant sur cette roue.
L'avantage que ces machines peuvent offrir dépend principalement de la construction des roues, des seaux et de la chaîne, ainsi que de la manière dont le déversement s’opère.
D’autre part, elles présentent de nombreux inconvénients. Les godets en en montant laissent tomber une partie de l’eau qu’ils avaient d’abord puisée et la machine élève toujours les godets plus haut que le fond du réservoir ou de la rigole d’écoulement. Enfin les godets étant très légers se déforment et se déchirent facilement dans les chocs fréquents qu’ils reçoivent pendant le mouvement oscillatoire que prend la chaîne lorsqu’on monte l’eau à une hauteur un peu grande.
L’irrigation des terres agricoles, nécessité primordiale de notre climat, explique l’usage de cette étrange machine venue du fond des âges et connue dans tout le bassin méditerranéen.
Plus simple lorsque possible, mais moins économe, les canaux ou béals captant l’eau détournée des cours d’eau, représentent un moyen plus commode d’irrigation des cultures comme à Saint Laurent du Var et dans ce quartier de Cagnes qui en conserve le nom.
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05/02/2011
LES GUEYEURS DE SAINT LAURENT DU VAR FÊTÉS GRÂCE À EDMOND ROSSI
UN PROJET D’EDMOND ROSSI DEVENU RÉALITÉ :
La Fête des « gueyeurs » de Saint Laurent du Var
L’idée d’une fête des gueyeurs à Saint Laurent du Var aurait le mérite d’être ancrée dans une tradition historique remontant à l’origine de la cité, bâtie au bord du Var pour en assurer la traversée.
Rappelons que déjà en 1005 l’abbé de Saint Véran reçut une habitation dans un hameau dénommé Varum, sur la rive droite du fleuve, où Saint Laurent s’est installé par la suite. Au XIIè siècle un ermite se rendait chaque année sur les bords du Var avec deux chevaux pour faire passer les pèlerins se rendant à l’abbaye de Lérins.
La création d’un hospice confié à des religieux va poursuivre cette coutume pendant les siècles suivants jusqu’au XVè siècle. « La barque de l’hospice » assurait alors le passage d’une rive à l’autre du Var.
Lorsque Saint Laurent est repeuplé en 1468 par son seigneur l’évêque de Vence, Raphaël Monso, désireux de garantir la sécurité du gué, obligation est faite aux nouveaux venus, de tenir une barque sur le Var pour en assurer le passage. Ces premiers gueyeurs laïques, dénommés « Riveraschi », vont s’organiser en corporation et maintenir leur activité jusqu’au XIXè siècle.
Les gueyeurs disparaîtrons lorsqu’un pont traversera enfin le fleuve de manière
définitive en 1864.
Les gueyeurs ont donc marqué le passé laurentin durant plus de huit siècles.
Aujourd’hui leur souvenir se perpétue dans le Vieux Village par une modeste rue portant leur nom, elle relie la place de la Fontaine à la rue des Remparts.
Récemment, en 2000, un rond point au carrefour des rues du 11 novembre, du Point du Jour et de l’Ancien Pont s’est vu paré d’une sculpture représentant une voyageuse à califourchon sur le dos de l’un de ces porte-faix, acteurs glorieux de l’Histoire de la cité.
Faire revivre ces personnages d’un autre âge permettrait de remémorer une époque riche d’anecdotes rapportées par des voyageurs célèbres confrontés à la périlleuse traversée du Var.
Saint Laurent du Var possède, grâce aux gueyeurs, un patrimoine original, unique en France, qui ne demande qu’à renaître.
Ces données historiques fondées sur la tradition locale pourraient se combiner au culte du plus illustre des gueyeurs, leur patron : Saint Christophe.
Voici résumées la vie et la geste de saint Christophe, martyr, qui souffrit sous l'empereur Dèce, vers 250. D’après les historiens ecclésiastiques, il était né dans le pays de Chanaan, de parents païens. Il fut baptisé par saint Babylas, évêque d'Antioche, et prêcha la foi en Lycie. Arrêté dans la ville de Samos, il convertit deux femmes nommées Aniceta et Aquilina, qu'on avait chargées de le séduire, et fut décapité, après avoir miraculeusement résisté aux plus atroces tourments.
Jacques de Voragine, dans la Légende dorée, fait de ce saint un géant qui, après avoir servi le diable, mit sa force au service des voyageurs qu'il prenait sur ses épaules pour leur faire traverser un fleuve large et profond.
Un jour, un enfant eut recours à sa charité; mais, parvenu au milieu de la rivière, l'enfant se trouva si lourd que le géant ne pouvait plus avancer. Il se retourna et reconnut l'Enfant Jésus. C'est à ce fait qu'il devrait son nom de Christophe ( en grec, qui porte le Christ ). Le culte de saint Christophe, très répandu en Orient, était au moyen âge populaire en Occident, surtout en Espagne, en Italie, en France et Allemagne.
Ses reliques étaient, dit-on, conservées à Tolède. II était, à Paris, le patron des portefaix. Les Latins célèbrent sa fête le 25 juillet; les Grecs, le 9 mai.
Iconographie : Les anciennes peintures byzantines représentent saint Christophe avec une tête de chien.
Le moyen âge eut une grande vénération pour saint Christophe : on croyait qu'il suffisait de regarder une de ses images pour être préservé tout le jour contre l'eau, le feu et les tremblements de terre. Tout récemment encore, il était de coutume d’afficher des médailles de saint Christophe dans les voitures et sur les porte-clés avec la mention : « regarde St. Christophe et va-t-en rassuré ».
Dans le passé, on prit l'habitude de le représenter dans des proportions colossales; on le peignit sur les murs des églises et même des maisons.
Aux XVè et XVIè siècles, les images de saint Christophe se multiplièrent. La plus ancienne gravure sur bois dont on puisse fixer la date représente ce saint portant sur ses épaules l'enfant-Jésus et traversant un fleuve. On montre, parmi les reliques de la cathédrale de Séville, une dent de saint Christophe, dont les dimensions justifieraient bien ce que dit la légende de la stature du colosse.
Le martyre de saint Christophe a été traité par le Tintoret et par Lionello Spada, dans un tableau très pathétique qui est au musée du Louvre. Hippolyte Flandrin a introduit une belle figure de saint Christophe dans sa frise de Saint-Vincent-de-Paul.
De nos jours la saint Christophe est célébrée le 21 août.
A partir de ces données, comment organiser une fête des gueyeurs à Saint Laurent du Var, haut lieu des prouesses de ces vénérables ancêtres, assujettis au passage du fleuve ?
Deux parties sont envisageables, une profane propre aux gueyeurs, la seconde religieuse destinée au culte de Christophe, leur saint patron.
La date du 21 août correspondant à la saint Christophe, se situe au cœur de la saison touristique à l’époque des principales fêtes patronales. Peut-elle être un moment de la fête patronale de la Saint Laurent ? La chose est envisageable, mais le dimanche suivant le 21 août semblerait plus opportun.
La Municipalité, maître d’œuvre des festivités serait soutenue par la participation active des associations, pouvant apporter leur concours dans leurs domaines respectifs.
Le Programme débuterait par une « messe des gueyeurs » célébrée à 10 heures, suivie à 11 heures par la « course mixte des gueyeurs », où les apprentis gueyeurs masculins porteraient sur leurs épaules une partenaire féminine. Trois équipes d’âges différents, minimes, juniors et seniors s’affronteraient sur un trajet à définir, soit de la rue des gueyeurs au rond point du Gueyeur, soit le long des berges du Var, devant la Mairie. Une remise de coupes récompenserait les vainqueurs, suivie d’un apéritif d’honneur au Parc François Layet.
Le « Banquet des gueyeurs » débuterait ensuite sur la place de la Fontaine, au cœur du Vieux Village, le menu servi, privilégierait des produits de la pêche, conformes à la vocation aquatique et fluviale des gueyeurs, truite, soupe de poisson avec croûtons et rouille, glace, un quart de vin blanc.
L’après midi à 16 heures, avec l’accord des autorités diocésaines, une « bénédiction des véhicules à moteurs » pourrait être organisée sur l’Esplanade du Levant, rappelant le rôle protecteur de saint Christophe, avec distribution de médailles du saint, gravées : « Regarde Saint Christophe et va rassuré ». Cette partie religieuse, tout comme les actuelles messes propres à bénir les animaux familiers, devrait très vite connaître un succès départemental.
Enfin, à 21 heures « Spectacle son et lumière, Saint Laurent à travers l’Histoire du gué », place Adrien Castillon face à l’Eglise et au porche de l’antique hospice.
Là serait évoqué les grands moments de l’histoire laurentine.
Dans l’organisation de cette fête pourraient être impliqués :
La section athlétisme du « Stade Laurentin », pour la compétition, le « Comité de Sauvegarde du Vieux Village », pour la tenue du Banquet, l’ « Action culturelle diocésaine », pour les commémorations religieuses, ainsi qu’un entrepreneur de spectacle (à faire soumissionner), pour le « Son et Lumière ».
Chiffré, l’ensemble de la contribution municipale envisagée porterait :
- sur l’offre de l’apéritif d’honneur et de trois coupes remises aux vainqueurs à cette occasion,
- sur la sécurité assurée par la Police municipale après installation de barrières, sur les lieux des festivités,
- mais surtout sur spectacle « Son et Lumière », dont la conception ne serait élaborée que la première année. Un tarif d’entrée au spectacle de l’ordre de 10 à 15 € devrait couvrir une partie des frais engagés.
La participation des convives au Banquet, sur la base modérée de 20 € pourrait équilibrer les frais engagés par le Comité du Vieux Village dans la préparation et le service de celui-ci.
Personnellement, je serais tout disposé à apporter mon concours bénévole, comme je l’ai toujours fait, pour contribuer dans la mesure de mes modestes moyens à la sauvegarde et à la promotion du patrimoine historique de Saint Laurent du Var.
En conclusion, si cette suggestion commémorative ne pouvait être réalisée, elle m’aura offert le plaisir d’évoquer un bref instant, le souvenir de ces gueyeurs qui durant des siècles portèrent sur leurs solides épaules les riches heures de Saint Laurent du Var.
Edmond ROSSI (27-11-2005)
La première « Fête des Gueyeurs » se tenait le 26 août 2006, organisée par le « Comité de sauvegarde du vieux village de Saint Laurent du Var », depuis chaque année en août la tradition est respectée…
17:32 Publié dans DECOUVERTE DU PASSE, HISTOIRE, MEMOIRE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tradition